Les produits de biocontrôle comme alternatives aux pesticides de synthèse

Les produits de biocontrôle comme alternatives aux pesticides de synthèse

Marie Moerman - Auteur

Introduction

Ces dernières années, l’utilisation de produits phytopharmaceutiques de synthèse pour la protection des cultures fait l’objet de polémiques en Europe. Les exigences en matière de résidus sont de plus en plus strictes et une attention croissante est accordée à l’environnement et à la santé publique des producteurs et des consommateurs. Bien que de plus en plus de produits phytopharmaceutiques biologiques aient été mis sur le marché ces dernières années, le secteur agricole n’en fait qu’un usage limité. Malgré leur bonne efficacité en laboratoire, leur efficacité sur le terrain peut être décevante. La recherche en est encore à ses débuts et les connaissances sur la lutte contre les maladies organiques ne sont pas encore suffisamment maîtrisées chez les producteurs.

Des recherches sont menées pour améliorer l’efficacité des produits phytopharmaceutiques biologiques sur le terrain. Les conditions environnementales, la technique de pulvérisation et/ou d’application, la formulation, le temps d’application constituent des facteurs qui peuvent avoir un effet sur l’efficacité des agents biologiques.

Qu’est-ce qu’un agent de biocontrôle ?

Le terme biocontrôle désigne un ensemble de solutions permettant de limiter les dégâts des maladies ou des ravageurs en utilisant des mécanismes d’actions et/ou d’interactions naturels. Les stratégies de biocontôle visent à la gestion des équilibres des populations de bio-agresseurs, plutôt qu’à leur éradication. Il repose sur l'utilisation d'organismes vivants (prédateurs, parasitoïdes, pathogènes) ou de substances naturelles (extraits de plantes, phéromones). Elles représentent un ensemble d’outils à utiliser, seuls ou associés à d’autres moyens de protection. 

Différents types de biocontrôle et de mode d’action

Les solutions de biocontrôle peuvent être de 4 types :

  • Macro-organismes : insectes, nématodes...Leur mode d’action est de deux ordres. Ils peuvent agir en tant que 

    • Prédateurs : Les prédateurs sont des organismes qui se nourrissent des ravageurs des cultures. Par exemple, les coccinelles sont des prédateurs efficaces des pucerons ;

    • Parasitoïdes : Ces organismes pondent leurs œufs à l'intérieur ou sur le corps des ravageurs. Les larves se développent en se nourrissant de leur hôte, ce qui finit par le tuer. Un exemple courant est la guêpe Trichogramma, utilisée en maraîchage pour lutter contre la mineuse de la tomate ou la piéride du chou.

  • Micro-organismes : virus, bactéries, champignons… Ils peuvent agir comme :

    • des pathogènes qui infectent et tuent les ravageurs. Le Bacillus thuringiensis (Bt) est une bactérie largement utilisée en agriculture biologique pour lutter contre les chenilles et autres insectes nuisibles ;

    • des compétiteurs : certains micro-organismes bénéfiques peuvent concurrencer les ravageurs pour les ressources, limitant ainsi leur développement. Par exemple, certaines bactéries du sol peuvent inhiber la croissance de champignons pathogènes.

  • Médiateurs chimiques : confusion sexuelle, attractifs olfactifs et alimentaires … 

  Ils comprennent les phéromones d’insectes (substance émise par les insectes pour communiquer) et les kairomones (substance chimique qui déclenche une modification comportementale chez une autre espèce vivante). Ils permettent le suivi des vols des insectes ravageurs et le contrôle des populations d’insectes par la méthode de confusion sexuelle et le piégeage.

Modes d'action:

     - Attraction sexuelle : les capsules de phéromone, spécifiques, attirent les ravageurs ciblés à l'intérieur des pièges où ils restent emprisonnés. Le piégeage des mâles limite la reproduction et ainsi les populations. 

      - Confusion sexuelle : diffusion dans les parcelles de phéromones de synthèse. Les mâles sont attirés et désorientés empêchant ainsi les accouplements.

 

  • Substances naturelles : extraits de plantes, huiles, soufre, bicarbonate, phosphonates …

Elles sont composées de substances présentes dans le milieu naturel et peuvent être d’origine végétale, animale ou minérale. 

Ces substances peuvent agir de différentes manières : 

  • biochimique : en bloquant un processus vital pour le bio-agresseur (activité insecticide, molluscicide ou herbicide) ou en stimulant les défenses de la plante (stimulateur de défenses naturelles,)

  • physique : en exerçant un effet répulsif ou en créant une barrière. 

Exemples : les pyrèthres, utilisés comme insecticides ; l’extrait de fénugrec, comme stimulateur de défenses naturelles.

Les substances actives qui peuvent être utilisées dans ces substances naturelles (produits phytopharmaceutiques), en agriculture biologique, sont définies au sein du règlement d’exécution (UE) 2021/1165, Annexe I.

Liste de produits phytopharmaceutiques autorisés en Belgique et utilisables en agriculture biologique est reprise sur le site Phytoweb

Défis et perspectives

Bien que les agents de biocontrôle offrent de nombreux avantages, leur mise en œuvre n'est pas sans défis. Leur efficacité peut être influencée par les conditions environnementales, les modes d’application, la formulation. Ces facteurs peuvent avoir un effet sur l’efficacité des agents biologiques.

L'amélioration des méthodes de production et de distribution des agents de biocontrôle, ainsi que le développement de nouvelles formulations plus efficaces, contribuent à surmonter ces obstacles.

Différents projets de recherche se sont penchés sur l’usage des biopesticides, pour en améliorer l’efficacité et l’usage. 

Dans le cadre du projet BIOPROTECT, des fiches techniques des produits de biocontrôle étudiés ont été rédigées qui reprennent des informations générales sur le contenu du produit, son efficacité, ainsi que sa méthode d’application correcte. 

Quinze fiches sont à destination des agriculteurs, qui concernent la protection de cultures de fruits, de légumes, plantes aromatiques et ornementales:

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Nom
Biopesticides disponibles en Belgique, testés et documentés dans le cadre du projet SmartBioControl/Bioprotect (Mars 2021)
Source
http://www.smartbiocontrol.eu/fr/projet-bioprotect/
Copyright

Le projet Smartbiocontrol a permis de créer une base de données en ligne qui reprend la liste de tous les agents de biocontrôle actifs contre les maladies fongiques autorisés en Belgique et en France et leurs propriétés. Cette liste est disponible en ligne via le lien suivant : http://www.smartbiocontrol.eu/fr/agents-de-biocontrole/ 

Actuellement, parmi les 129 agents de biocontrôle repris dans cette base de données, 30 sont autorisés en Belgique et 99 en France.

La recherche se poursuit aujourd'hui en Wallonie avec les projets Trans Control et Trans-e-Bio du nouveau portefeuille de projets Interreg VI BioControl 4.0 et le projet Lipomme Bio 2.0. 

 

Références bibliographiques

http://www.smartbiocontrol.eu/fr/resultats-projet-smartbiocontrol-2/#Fiches-techniques

https://fytoweb.be/fr/produits-phytopharmaceutiques/produits-specifiques/biopesticides/agriculture-biologique

https://fytoweb.be/sites/default/files/guide/attachments/produits_agrees_en_bio_-_fr_20221201.pdf

https://bioprotectionportal.com/fr/

https://theconversation.com/le-biocontrole-pour-remplacer-les-pesticides-de-la-difficulte-de-changer-les-usages-186882

https://www.livre-blanc-cereales.be/wp-content/uploads/2021/03/9.-Perspectives.pdf

https://www.recherche.uliege.be/cms/c_19800408/fr/interreg-vi-france-wallonie-vlaanderen-9-projets-finances-a-l-uliege-dans-le-cadre-du-1er-appel-a-projets