Le concombre

Le concombre

Daniel Wauquier - Auteur technique

Introduction

Le concombre est une plante exigeante en chaleur et en humidité. En région wallonne, il se cultive principalement sous serre tunnel. Toutefois, la production sous abri de cette culture entraine un développement important de certaines maladies et ravageurs (pucerons et acariens tétranyques). Le thrips est relativement bien géré par la lutte biologique. Le mildiou est également problématique lors de périodes humides. Le système racinaire du concombre est également relativement fragile et montre une sensibilité aux maladies telluriques.

Généralement, on observe un pic de production de 3 semaines et puis un déclin de la culture. En effet, un manque d’étalement de la mise à fleur entraîne un épuisement rapide du plant, qui s’accompagne souvent de maladies et ravageurs. Vu la difficulté de conserver une production régulière, il est donc intéressant de réaliser 2 à 3 séries de concombres sur la saison afin d’étaler la courbe de production.

Implantation

L’optimum de température de la germination est de 25°C. La plantation sera effectuée au stade 3 vraies feuilles.

Il est important d’avoir un sol aéré et drainé. La plantation est une étape critique qu’il faut réaliser avec soin, sans recouvrir le collet, ni blesser le plant, afin d’éviter la pourriture du collet. La température du sol est fondamentale lors de la plantation. Elle devra préférablement atteindre 15°C pour permettre un bon enracinement et éviter le développement de maladies, très courant en début de culture lorsqu’il fait froid. Ne plantez pas la première série trop tôt (pas avant fin avril, sous abri froid). La dernière plantation pourra se faire jusque fin juin.

En culture sous abri et pour un rendement espéré de 8kg/m², une fertilisation de 150 u/ha d’azote, 80 u/ha de phosphore et 200 u/ha de potassium sera nécessaire. Pour calculer l’apport de fertilisant, il faudra déduire les quantités déjà présentes dans le sol.

La densité conseillée est de 1,6 bras par m². Avec des plants greffés, la culture pourra être menée sur 2 bras et les densités pourront être divisées par 2. Les plants greffés sont plus résistants aux maladies du sol, acceptent une température du sol plus faible à la plantation (gain de précocité), et ont un rendement supérieur (30 à 32 fruits contre 20 fruits en non greffé).

Conduite

Le plant est conduit sur un bras (ou deux pour les plants greffés), les gourmands sont donc enlevés à l’aisselle de chaque feuille. On supprime également les fleurs apparaissant en dessous de 40-50cm pour favoriser le développement végétatif en début de culture et éviter la production de fruits déformés et salis au contact avec le sol. En effet, les fruits qui touchent le sol sont, de toute manière, déformés et risquent de se dégrader rapidement. On utilise généralement une ficelle pour tuteurer les plants. Le tuteurage et l’égourmandage assurent une bonne exposition à la lumière qui donnera une couleur bien verte au fruit.

L’irrigation doit être menée finement afin d’éviter tout manque et tout excès. Elle est de l’ordre de 50% de l’ETP au premier fruit en fleur, ce que l’on peut évaluer, dans nos conditions, à en moyenne 1 litre/jour/plante, puis de 90 à 100 % de l’ETP au début de la récolte, de l’ordre de 2 à 3,5 litres/jour/plante. Il faut aérer tôt et laisser l’abri ouvert dès que les températures ne descendent plus sous 14°C la nuit. Le concombre est une plante dont le système racinaire est particulièrement délicat. Idéalement, il faut fractionner les apports en 2 à 4 arrosages par semaine et utiliser une eau d’irrigation tempérée (supérieure à 12°C).

L’hygrométrie de l’air doit être élevée. Une hygrométrie trop faible provoque des déformations du fruit. Mais, il faut également éviter les excès d’hygrométrie en matinée, favorable au développement des maladies.

Pour éviter l’excès de chaleur, il est intéressant de blanchir les bâches plastiques et de réaliser de courtes durées d’aspersions pour réduire la température sous abri. Cette pratique permet également d’augmenter l’humidité relative lorsqu’elle est trop basse. Toutefois, attention de ne pas asperger des plants trop chauds avec de l’eau trop froide car cela augmente le flétrissement et crée des gerçures sur le fruit.

Éliminez rapidement les fruits déformés pour favoriser la fructification.

Maladies

-        Oïdium

L’oïdium apparait souvent durant la 2ième phase de la culture. Une réduction du rendement est observée à partir de 25% du feuillage attaqué. Il persiste l’hiver sur les adventices ou les structures des serres. Un climat sec favorise ce champignon. Ne pas laisser le taux d’humidité descendre trop bas sous tunnel.

-        Botrytis cinerea

L’infection par botrytis nécessite souvent la présence d’une porte d’entrée comme une blessure. Il faut également éviter la condensation sur le feuillage le matin par une aération.

-        Sclérotinia

Le sclérotinia se présente sous la forme de mycélium blanc sur la pointe du fruit. On observe également à un stade plus avancé la présence de sclérotes noires.

En cas de fortes attaques précédemment, épandre après la culture sensible un champignon parasite coniothyrium minitans (Contans).

-        Cladiosporium

Cette maladie apparait par temps frais et humide. En choisissant une variété résistante, on évite ce problème.

-        Mildiou (pseudoperonospora cubensis)

Les symptômes apparaissent sur la face supérieure des feuilles par des taches angulaires d’abord verts clairs délimitées par les nervures puis jaunes et enfin sec. Sur la face inférieure, on observe un aspect huileux puis feutré.

Ce mildiou attaque également les melons. Une durée d’humectation du feuillage de 2 à 4 heures à 20-25 °C suffit pour favoriser une infection. Il faut une rupture de la période humide d’au moins 4 heures pour interrompre le cycle. La maladie peut se développer très rapidement sous tunnel.

Les solutions curatives n’existent pas. Il faut travailler en amont sur les conditions climatiques sous abri.

-        Verticillium

Cette maladie pénètre depuis le sol vers les vaisseaux vasculaires des plantes. Des taches jaunes en forme de V apparaissent sur les bords du limbe. Les tissus vasculaires virent au brun et se décolorent, puis les plants flétrissent et finissent par mourir.

-        Fusarium

Le fusarium pénètre depuis le sol vers les vaisseaux vasculaires des plantes. Le fusarium donne un feuillage qui prend une teinte vert terne qui flétrit et les tissus vasculaires deviennent brun-rougeâtres. Le flétrissement a lieu de manière brusque de haut en bas du plant. Il est conseillé d’arracher rapidement les plants.

-        Didymella bryoniae ou pourriture noire ou encore chancre gommeux

La maladie se transmet par voie aérienne. Les parties internes et externes des fruits peuvent être atteints. Cette maladie provoque un amincissement de l’extrémité du fruit. Sur les feuilles, la pointe prend la forme de tissus morts et peut même aller jusqu’à prendre la forme d’une coupole inversée.

-        Phomopsis ou dépérissement racinaire

Cette maladie développe des nécroses sur les racines avec de légers points noirs et collet brun, puis liège sur racines âgées.

-        Pythium

Le pythium impacte principalement les semis et les jeunes plants. Pour éviter cette maladie et le dépérissement des plants, il ne faut pas planter trop tôt en sol froid et trop humide. L’installation de bâches noires quelques jours avant la plantation et la fermeture des tunnels ainsi que l’utilisation de plants jeunes sont de bonnes pratiques afin d’éviter le pythium.

-        Virus de la mosaïque du concombre (CMV) et le virus de la marbrure verte du concombre (CGMMV).

L’identification des différents virus est souvent difficile. Ils développent souvent des mosaïques sur les feuilles et déforment également celles-ci. En concombre, on peut également observer parfois un flétrissement brutal avant l’apparition de mosaïques. Les symptômes s’accompagnent d’une baisse de croissance qui va parfois jusqu’à la mortalité par suite d’un flétrissement complet.

Dans le cas de virus, il est impératif de lutter contre les vecteurs de propagation (pucerons).

Ravageurs

-        Acariens tétranyques

Un faible taux d’humidité de l’air favorise les acariens tétranyques et inhibe les auxiliaires acariens prédateurs. Il faut s’efforcer de maintenir un taux d’humidité de l’air entre 60 et 80%. Les jours ensoleillés il est conseillé d’humidifier l’air entre 11h et 16h par des cycles courts d’irrigation.

Lorsque l’envahissement est important, pratiquer un effeuillage des plants. Pour maitriser la situation, il est possible d’avoir recours à des auxiliaires de cultures (les Amblyseius sp., Phytoseiulus). On utilisera Amblyseiulus californicus en préventif et Phytoseiulus persimilis sur les foyers. Idéalement, il faut intervenir le plus tôt possible pour avoir une chance de réduire l’infestation.

-        Aleurodes

La problématique est moins courante. Si on y fait face, il est conseillé d’introduire des guêpes parasitoïdes (Encarsia formosa) ou de traiter avec un produit phytopharmaceutique mais cela apparaît rarement nécessaire dans nos tunnels maraichers.

-        Pucerons

Les pucerons rabougrissent l’apex, entrainent une décoloration nervaire et salissent les feuilles par le miellat et la fumagine. Les prédateurs et parasitoïdes naturels ont une action importante sur les pucerons. La pression peut être augmentée par des lâchers d’aphidius (A. colemani ou A. ervi selon les différents pucerons) ou des prédateurs (chrysopes, coccinelles).

-        Thrips (Frankliniella occidentalis)

Les piqures de thrips sur les jeunes fruits entrainent des déformations importantes qui sont associées au développement d’une zone liégeuse correspondant à la cicatrisation. Sur les feuilles, cela provoque des tâches argentées puis blanchâtres avec des ponctuations noires qui correspondent à leurs déjections. Le développement de la population de thrips est particulièrement important par temps chaud et sec. Attention, après la moisson d’un champ voisin, on observe une arrivée importante de thrips.  

Il est envisageable de faire des lâchers d’acariens prédateurs (Amblyseius) et des punaises prédatrices (Orius) en maintenant un taux d’humidité supérieure à 60%.

-        Punaises

Les punaises Lygus spp. et Nezara viridula entrainent des dégâts importants par leurs piqures. À la suite de ses piqures, l’apex du plant se nécrose, les feuilles se déforment et les boutons floraux se dessèchent. Aucun traitement existe dans ce cas, hormis la récolte manuelle des punaises et le piégeage par plaque engluée. 

Les mesures préventives et les traitements curatifs

Les mesures préventives à mettre en place :

1.      Aération maximale

2.      Sol riche en humus

3.      Tenir l’humidité relative la plus basse possible à la levée du jour.

4.      Humidifier l’air à midi car cela inhibe les acariens ravageurs et stimule les acariens prédateurs.

5.      Avoir une humidité relative la plus faible possible le soir (mildiou, Didymella)

6.      Choisir une densité inférieure à 1,6 plant par m²

7.      Variété résistance à CMV et tolérante à l’oïdium et au mildiou

8.      Éviter l’humectation prolongée du feuillage

9.      Désinfecter les outils et les mains après contact avec des foyers infectés.

10.   Travailler dans les séries les plus jeunes et moins infestées puis passer aux plus vieilles.

11.   Rotation pour éviter les maladies des racines.

12.   Espacer les différentes cultures de cucurbitacées sous abris.

Les traitements curatifs disponibles en bio pour la culture du concombre sous abri sont présentés dans le tableau ci-dessous :

Pour en savoir plus sur les recommandations liées à ces produits phytopharmaceutiques, vous pouvez consulter le site Phytoweb

 OïdiummildiouBotrytis cinereaPythiumFusariumDidymella bryoniaeAcarien tétranyqueAleurodePuceronThrips
Hydrogenocarbonate de sodium (substance de base)v         
Hydrogenocarbonate de potassium (ou bicarbonate de potassium)v         
Sels potassiques d’acides gras (savon noir)      vvv 
Huile essentielle d’orangev      v  
Bacillus subtilis (serenade)v v       
Soufrev     (v)   
Gliocladium catenulatum (prestop)  vvvv    
Trichoderma asperellum   v      
Bacillus amyloliquefaciensvvv       
COS-OGAv         
Ampelomyces quisqualisv         
Pyréthrine       vvv
Lecanicillium muscarium       v  
Isaria fumosoroseus       v  
Beauveria bassiana       v  
Metarhizium anisopliae       v v
Paecilomyces fumosoroseus       v  
Azadirachtine      vvvv
Spinosad (tracer)         v

Désordres physiologiques

Eau trop froide sur un plant chaud : gerçures du fruit et des feuilles.

Manque d’eau : tête fanée, plante trop générative

Excès d’eau : nécrose apicale possible, fruits déformés.

Manque d’hygrométrie : risque de déformation des fruits.

Carence en azote : tout le feuillage est plus clair. Les concombres sont pointus.

Variétés

Le type le plus cultivé est le « type hollandais », long et lisse. Toutefois, il existe une petite niche pour le concombre court lisse ou épineux, qui est plus rustique. Des variétés plus digestes existent également ainsi qu’un créneau pour des mini concombres et le concombre cocktail.  

Le concombre court sera plus adapté que le long en extérieur (sans tuteurage et sans palissage) car le concombre type hollandais se déforme très vite au contact du sol.

Akito F1VitCourt et épineux; précoce
Katrina F1, Passandra F1VitCourt et lisse
Pontia F1VitCourt et épineux ; plein champ
Tanja Long ; plein champ
Marketmore Mi-long 20-25cm ; plein champ
CleophaBGS, SatLong ; pathénocarpique
Styx F1, Amaluna F1, Komet F1, Dreamliner F1VitLong

Récolte et conservation

Pour avoir un produit calibré, il faut récolter deux à trois fois par semaine en matinée. Toutefois, à certaines périodes, une récolte quotidienne sera nécessaire. Des récoltes rapprochées améliorent la qualité du produit et déchargent le plant. Le calibre standard est de l’ordre de 400 à 500 gr. Il est envisageable de produire 8 à 12 kg /m² (soit 20 à 30 fruits/m²). La température idéale de stockage sera de 12 à 15°C. Le concombre peut se conserver ainsi 10 à 14 jours.