Les ovins viandeux

Les ovins viandeux

Thibault Lavis - Auteur technique

Cycle de vie

La majorité des races ovines ont une reproduction photopériodique, saisonnière, en fonction de la longueur du jour. L'ovulation de la brebis a lieux lorsque les jours diminuent, du début de l'été à la fin de l'automne. C'est l'œstrus saisonnier, la période de fécondation. Cette durée varie en fonction des races.

Certaines sont précoces (œstrus long), d'autres sont tardives (œstrus court).

La période de gestation moyenne est de 147 jours. Les races précoces (fécondables dès début juillet) agnèleront dès décembre. Les races tardives (fécondable en automne) agnèleront à partir de février.

La sélection a permis  de développer des races peu photosensibles, qui "désaisonnent". En fonction des dates d'agnelage, les agneaux seront élevés en bergerie ou en prairie.

Les agneaux de bergerie (précoces): 
  • Accouplement précoce en juillet aout, 
  • Naissance vers décembre, janvier,
  • Abattage à un âge moyen de 90 à 100 jours et poids moyen de 35 à 38 kg,
  • Ce sont les agneaux de printemps (semaine de Pâques et suivantes),
  • Agneaux élevés en bergerie (cf conditions climatiques hivernales, seules les brebis sortent en prairie),
  • Croissance rapide des agneaux (350g/jour soit 4 kg en 11 jours) => Nécessité d'organiser ses ventes 

NOTE REGLEMENTATION BIO: les agneaux doivent sortir dès que les conditions climatiques le permettent.

Les agneaux d'herbage (tardifs): 
  • Accouplement de septembre à décembre (souvent organisés entre septembre et octobre pour faciliter des naissances en bergerie),
  • Naissances à partir de février,
  • Sortie des agneaux en prairie 1 mois après naissance (autour d'avril),
  • Abattage vers 6 mois (de fin aout à début décembre) le poids moyen est de 42 à 45 kg,
  • Finition des bêtes par un engraissement quelques semaines avant abattage
    • finition 100% à l'herbe (plus difficile sous nos latitudes belges)
    • ou, avec des aliments concentrés bio
Les agneaux à contre-saison:

Issus de races qui dessaisonnent.

Permet d'étaler les mises bas, et donc d'étaler les périodes de commercialisation.

Permet de mieux atteindre 1 agnelage / an / brebis. Les femelles non-fertiles ou ayant avorté lors de la 1ere passe peuvent être remise à la reproduction au cours de la même année.

 

Les races

Le choix appartient à l'éleveur en fonction de la finalité de sa production (viandeux, laitier, laine...)et du type de conduite l(élevage (agneau de bergerie ou d'herbage…)

Attention, le règlement bio stipule que la race choisie doit pouvoir s'adapter aux conditions climatiques locales, leur vitalité et de leur résistance aux maladies et aux problèmes sanitaires de la région.

Les animaux croisés seront utilisés pour associés des qualités entre elles (aptitudes maternelles et qualité bouchère par exemple)

Les types plus viandeux: 
Texel "Culard"
  • meilleure configuration bouchère (rapport poids viande/carcasse)
  • race saisonnière tardive
  • agnelage plus difficiles (souvent tardif, au pré, sur des animaux de petit gabarit, donc à surveiller)
  • animaux assez sensibles.

 

Texel français
  • bon compromis entre aptitudes maternelles et qualités bouchères
  • race saisonnière tardive
Hampshire
  • meilleur rapport sobriété alimentaire / conformation bouchère 
  • race saisonnière très précoce
Suffolk
  • bonnes aptitudes bouchères
  • race saisonnière précoce
  • vitesse de croissance des agneaux rapide
Vendéen
  • race saisonnière très précoce (dès fin juin)
  • bonnes aptitudes bouchères
 
Les types les plus prolifiques
Swifter
  • race saisonnière tardive (d'herbage)
  • prolificité moyenne de 2.6 agneaux par portée, les portées de 4 ne sont pas exceptionnelles
  • Attention, les brebis ne produisent pas toujours suffisamment de lait (complémentation a prévoir) 
Bleu du Maine
  • race saisonnière tardive (d'herbage)
  • race la plus maternelle
  • grand gabarit
  • grande facilité d'agnelage
  • prolificité de 2.2 agneaux par portée
  • bonne production laitière
Les races qui dessaisonnent
Ile-de-France :

bonne qualité bouchère 

Romane: 
  • race hybride
  • bonnes qualités maternelles
  • bonne qualité bouchère lorsqu'elle est croisée avec un mâle viandeux

 

Races locales menacées
Ardennais roux
  • race saisonnière tardive (d'herbage)
  • adapté aux terrains pentus et boisés
  • aptitudes bouchères assez mauvaises biens que sa viande soit réputée sur la plan gustatif
Entre-Sambre-et-Meuse
  • race saisonnière tardive (d'herbage)
  • grand gabarit
  • prolificité interressante
  • aptitudes bouchères demandant à être resélectionnées
Mergelland
  • race saisonnière tardive (d'herbage)
  • peu d'aptitudes bouchères
  • bien adaptée aux conditions environnementales difficiles (réserves naturelles....)
Race intéressante d'entretien de terrain
Soay

Race rustique à mue (pas de tonte)

Très petit gabarit élevé pour l'entretien de terrain

Infrastructures et bâtiments

Des infrastructures simple suffisent.

Bien ventilé et propre, ils ont besoin d'un abri contre le froid et la pluie en hiver, et de prairies avec de l'ombre en été.

Les normes bio sont résumées dans le tableau suivant: 

À l'intérieur (superficie nette dont disposent les animaux)À l'extérieur (aire d'exercice, à l'exclusion des pâturages)
1,5 m² par mouton/ chèvre2,5 m² par mouton/ chèvre
0,35 m² par agneau/ chevreau0,5 m² par agneau/ chevreau

 

Tous les animaux doivent pouvoir accéder en même temps à l'aliment distribué (place à l'auge 0.4m/brebis). Usuellement on prévois 3m² / brebis de prolificité moyenne de 1.65 (agneaux et espaces auge et couloirs compris). 

 

Alimentation

Généralités

L'alimentation des ovins pourra essentiellement être assurée par l'herbe. Ceci requiert une bonne gestion des prairies avec une charge maximale de 2 UGB/ha soit 13,3 ovins (agneaux inclus). 

Pour être autonome en fourrage il faut compter : 

  • 7-8 brebis / ha pour une production d'agneaux d'herbage bio.
  • 9-12 brebis/ha pour une production d'agneaux de bergerie. 
  • En milieux difficiles (réserves naturelles) on maintiens la pression a 3-4 brtebis par hectare compte tenu de la pauvre qualité des herbages.

La complémentation sous forme d'aliments concentré est autorisé sans dépasser 40% de la ration quotidienne et doit répondre aux critères de la réglementation bio : 

  • être issue de l'agriculture biologique
  • être basée sur une utilisation maximale des pâturages
  • ne pas contenir de substances pour stimuler la croissance ou la production 
  • Ne pas contenir de substances pour maitriser la reproduction (synchronisation des chaleurs)
  • Ne pas contenir d'OGM
  • Au moins 60% de la matière sèche composant la ration quotidienne doit provenir de fourrages grossiers, frais, séchés ou ensilés. C'est à dire qu'en période spécifique avec des concentrés (gestation, allaitement, engraissement...), ceux ci ne peuvent dépasser 40% par jour.
  • En dehors des transhumances, au moins 70% (60% jusqu'au 31.12.2023) des aliments doivent provenir de l'unité de production elle même, ou à défaut d'exploitation de la même région. En Wallonie, la région regroupe l'ensemble du territoire Belge, le Grand Duché du Luxembourg, en France: les régions Haut-de-France, Normandie, Îles-de-France et Grand Est. En Allemagne les Länder Nordrhein-Westfalen, Rheinland-Pflaz, Hessen, Saarland et Baden Württenberg. Enfin aux Pays-Bas, les régions Zuid-Nederland, West-Nederland et Oost-Nederland.

Autonomie

Vous pouvez nourrir vos animaux avec vos propres mélanges (exple: triticale/ avoine / pois ou épeautre / avoine / pois).

Dans ce cas, attention au bon calibre des constituants. Une ingestion trop massive d'aliments volumineux peut entrainer un étouffement.

Attention également aux rations en Cuivre. Le mouton a un métabolisme différent des autres ruminants et il peut bioaccumuler le cuivre dans son foie jusqu'à des doses létales. Le niveau maximum tolérable de cuivre chez les ovins est fixé par le NRC (2007) à 15 mg/kg MS lorsque les niveaux de molybdène dans la ration se situe entre 1 et 2 mg/kg MS et le niveau de soufre entre 0,15 et 0,25 % de la MS de la ration.

En pratique: faire coïncider les périodes de forts besoins nutritionnels (fin de gestation, allaitement, engraissement) aux période de mai-juin (herbe de bonne qualité disponible), permet de réduire le recours aux aliments concentrés.

Les agneaux d'herbage (accouplement sept/oct - naissance à partir de février) sont donc à privilégier pour une autonomie fourragère. La qualité de l'herbe est suffisamment riche en protéines pour les brebis allaitantes. Si les brebis sont affaiblies, il faudra leur apporter un complément énergétique sous forme de céréales.

En fin d'automne, l'herbe est trop pauvre pour les besoins des brebis en fin de gestation. Les rentrer 1 mois avant l'agnelage et les soigner avec un fourrage complémenté avec un concentré.

Alimentation des agneaux

Allaitement exclusif jusqu'à 3-5 semaines

Sevrage de 2.5 à 4 mois.

Agneau d'herbage: Allaitement préconisé pendant 16 semaines

Le règlement bio stipule que les brebis allaitent 45 jours minimum (6 semaines et 3 jours). Dans le cas contraire, il faut utiliser du lait naturel.

Santé et soins vétérinaires

Le parasitisme est l'élément santé le plus critique d'un élevage ovin. En bio, l’administration de traitements étant limitée, le suivi sanitaire des animaux doit être régulier. L'objectif est de trouver l'équilibre "hôte-milieu-parasites-développement de l'immunité". On veillera a ne pas dépasser le niveau critique entrainant des pathologies ou des baisses importantes de production.

Les bases des soins en élevage bio: 

  • Privilégier une conduite préventive plutôt que curative. L’approche préventive conduit à d’avantage d’observations, principalement de l’état de santé et corporel : état général, appétit, consistance des fèces, aspect de la laine et du poil, muqueuses des yeux.
  • Privilégier les produits phytothérapiques, homéopathiques, ainsi que les produits minéraux, vitamines et oligo-éléments énumérés dans le règlement bio. Ceux-ci sont autorisés de préférence aux médicaments vétérinaires allopathiques chimiques de synthèse ou aux antibiotiques, à condition qu’ils aient un effet thérapeutique réel sur l’espèce animale concernée et sur l’affection pour laquelle le traitement est prévu.
  • Les traitements vétérinaires allopathiques chimiques (ex. vermifuges et antibiotiques) sont interdits en préventif et ces traitements sont limités en nombre en curatif. Ils doivent être validés par un vétérinaire (DAF, prescription, note signée par le vétérinaire dans le carnet d’élevage, …). En cas de recours à ces traitements, le délai d’attente légal est doublé et il est de minimum 48 heures avant la commercialisation. 
  • Les vaccins immunologiques sont autorisés. 

Déclassement

En dehors des traitements légaux obligatoires (vaccinations, traitements antiparasitaires et plan d’éradication), il y a déclassement si l’animal :

  • Est traité plus de trois fois sur 12 mois avec des médicaments vétérinaires allopathiques chimiques de synthèse ou antibiotiques si son cycle de vie productif est supérieur à un an (ex. brebis), 
  • Reçoit plus d’un traitement si son cycle de vie productif est inférieur à un an (ex. agneaux).

En pratique

La prophylaxie passe par: 

  • L'administration de colostrum à la naissance est cruciale. Pour favoriser la production de bonnes quantités de colostrum et de bonne qualité, une alimentation de qualité des brebis est clé.
  • L'âge du sevrage est importante. L'alimentation lactée tardive aide les jeunes à se défendre contre les parasites.
  • Une alimentation de qualité et diversifiée. par exemple, les plantes à tanins sont efficaces contre les nématodes gastro-intestinaux et ont un effet positif sur la capacité animale à maintenir un niveau de production malgré la présence de parasite.

Les analyses coprologiques (excréments) sont recommandées: 

  • avant et après administration de vermifuge (avec prescription vétérinaire) pour vérifier l'efficacité et l'absence de résistance
  • après la mise à l'herbe et avant de les rentrer en bergerie
  • A l'achat de bêtes.

Une conduite du pâturage éclairée permet de diminuer la pression parasitaire Pour cela: 

  • éviter le pâturage trop ras des prairies (80% des parasites se situent dans les 5 premiers cm)
  • éviter de faire pâturer plus de deux fois sur la même parcelle.
  • alterner fauche/pâture
  • si possible faire des rotations bovins, porcins et/ou chevaux (pas de chèvres)
  • clôturer les zones trop humides
  • éviter les endroits de forte concentrations (déplacer régulièrement les zones d'abreuvement)
  • éviter de herser les pâtures car on disperse les parasites (exception en début de période sèches si les animaux n'y retournent pas avant longtemps)
  • surveiller les diarrhées des jeunes (détection des coccidioses)
  • mettre les animaux sensibles sur les surfaces à faible pression parasitaire et rompre le cycle de contamination par un hivernage en bergerie.
  • pour la finition des agneaux à l'herbe, les mettre sur des parcelles non pâturées depuis la mise à l'herbe
  • bien composter le fumier pour détruire les œufs de parasites

Contre le piétin: 

  • tailler annuellement les onglons des animaux, 
  • éviter de faire pâturer dans des zones trop humides
  • pailler régulièrement la bergerie